Synopsis

« Cathédrales de Sées, 2000 ans d’histoire », le spectacle Musilumières 2022

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Depuis 2000 ans, les peuples de tous les âges ont bâti des temples sur le coteau dominant les premiers méandres de l’Orne. Notre-Dame de Sées, ultime sanctuaire de cette longue lignée, a été façonnée par des siècles de feu.

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Un temple romain s’élevait à cet endroit, à l’époque où Sées s’imposait comme l’une des principales cités de la province. Vers l’an 400, ce temple fut abattu pour laisser la place à la première cathédrale chrétienne, construite par Saint-Latuin, évangélisateur du pays.

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L’évêque Azon-le-vénérable gratifia Sées d’une robuste cathédrale pour franchir l’an mil. Épisode douloureux entre tous, le monument d’Azon périt accidentellement par les flammes en 1048. La vaste cathédrale romane qui lui succéda, construite par Yves de Bellême, ne survécût pas un demi-siècle, victime des luttes de pouvoir entre Capétiens et Plantagenêt.

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Vainqueur du souverain anglais Jean sans Terre, le roi de France Philippe Auguste voulut que des décombres, jaillisse un monument glorieux. L’église sagienne prit part à l’éclatant mouvement qui couvrit l’Europe de majestueuses cathédrales gothiques.

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Un âge d’or s’esquissait, débordant d’espérance. Maîtres d’œuvre et artistes s’attachèrent à dessiner une cathédrale ouverte sur la ville, déployant de multiples statues polychromes en façade, encadrées de deux portails latéraux évoquant la nature du jardin d’Eden.

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Les pierres fraîchement sculptées et les vitraux nouvellement soudés furent rapidement ébranlés par la guerre de Cent Ans. Au milieu des charpentes en cendres, des vitraux brisés et des pierres calcinées, Notre-Dame de Sées resta debout.

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À la fin de la guerre de Cent Ans, la renaissance de la cathédrale coïncida avec la Renaissance culturelle et littéraire, à l’aube du XVIe siècle. Statuaire peinte et vitraux resplendissants reprirent leur rôle de livre d’images enluminées.

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Advint l’épisode le plus amer qu’une église puisse affronter : la guerre des religions. Les affrontements irréductibles entre catholiques et réformés aboutirent à la destruction totale des archives et bibliothèques dans un vaste brasier. La cathédrale devint orpheline de sa propre histoire.

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Les siècles suivants prolongèrent cette tristesse dévastatrice : personne ne voulut procéder aux réparations. Les procès mobilisèrent les juges pendant plus d’un siècle et demi. En 1740, de guerre lasse, monseigneur Lallemant fit barrer les portes et interdire l’accès du sanctuaire devenu dangereux.

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Les évêques Néel de Christot et d’Argentré investirent leur fortune personnelle pour éviter l’ultime chaos. Ils consolidèrent la structure et dotèrent l’intérieur d’un mobilier somptueux. Un vent nouveau soufflait sur l’Europe : le langage évangélique imprimé dans le calcaire s’incarnait.

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L’alliance entre les valeurs religieuses d’amour du prochain et les idéaux révolutionnaires d’égalité fut de courte durée. La Terreur conduisit à la destruction méticuleuse des statues de la façade. Dans ce temple redevenu païen, s’installa le culte à la déesse Raison.

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Peu à peu, le dialogue reprit entre l’État et l’Église, et un Concordat fut signé. Ceux qui croyaient au ciel et ceux qui n’y croyaient pas reconnaissaient simplement que la beauté d’un monument appartient à tous.

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Les bombardements de 1940 sur Sées épargnèrent la cathédrale. Mais, petite parmi les cathédrales de France, Notre-Dame de Sées fut oubliée. Au plus sombre de l’abandon, le langage symbolique pensé par les maîtres d’œuvres médiévaux persistait : la course du soleil engage chaque année le dialogue des deux rosaces du transept, marquant les solstices et les équinoxes.

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Spirituellement initié au Ve siècle, architecturalement créé au XIIIe siècle, l’édifice reste tributaire de l’attention de chaque époque. Tel un oiseau de feu en dialogue permanent avec la lumière, Notre-Dame de Sées survivra tant que son peuple lui conservera amour et beauté.

Visuel de l'affiche du spectacle Musilumières 2014